Aurore DUB

Quelques semaines après le départ des Volturi, Jacob semblait constamment sur la défensive dès que quelqu’un d’autre que moi s’approchait de Renesmée. Il est vrai qu’elle était devenue une jeune fille magnifique, paraissant bien plus âgée que ce qu’elle n’était en réalité. C’est ainsi qu’à maintes reprises, il m’était donné d’entendre deux grognements que j’aurai reconnu entre mille, celui de Jacob et celui d’Edward. Les premiers temps dès que j’entendais ces feulements, je me précipitais dans la pièce où se trouvait Renesmée afin de la protéger. Mais au bout de quelques jours, tout le monde eu l’habitude de ce manège, et personne, même pas Renesmée, ne s’inquiétait de leurs humeurs.
Cependant un jour que nous étions partis nous promener dans la forêt, Edward Jacob, Renesmée et moi, la dispute entre les deux hommes fût plus agressive que d’ordinaire. Alors que Renesmée et moi-même s’amusions à grimper dans les arbres pour observer une énième espèce vivant dans cette forêt luxuriante, nous fûmes toutes deux prises d’un étonnement extrême et j’arrivais même a lire dans les yeux de ma fille la terreur qu’elle éprouvait. Nous ne descendîmes pas tout de suite de notre perchoir. Nous observions avec attention nos deux hommes qui se trouvaient dans une prairie à un ou deux kilomètres de là.
Mon Edward qui était d’ordinaire si calme et doux, paraissait comme envahit d’une rage que je n’avais que trop rarement vu depuis que nous nous étions rencontré. Peut-être la rage qu’il avait eu envers James il y a si longtemps pouvait être comparable à celle-ci. Et encore… Mais cette histoire me paraît si loin aujourd’hui ! Tant de choses se sont produites depuis! Je n’arrive même pas à me souvenir le nombre de fois où j’ai mis ma vie en danger, volontairement ou par accident. Tout ces souvenirs me semblent parvenir d’une autre vie, d’une vie humaine si faible et pourtant si importante pour ma famille. Mon père ne voulait toujours pas savoir ce que j’étais devenue. Il m’aimait comme il me connaissait et ne voulait pas en savoir plus. Quant à ma mère, elle ignorait totalement l’existence des vampires, comme celle des loups-garous d’ailleurs. C’était mieux, ainsi elle ne serait jamais en danger. Et si cela arrivait, je serai apte à la protéger. Tel était l’un des nombreux avantages à être l’un des leurs, à être un vampire, puissante et qui plus est détenant un pouvoir qui me permettait de me protéger moi mais également toutes les personnes se trouvant dans un rayon de plusieurs mètres, des attaques extérieures.
Quant à Jacob, je le voyais là-bas, il avait même muté en loup tant sa rage était forte. Il avait les babines retroussées et le poil hérissé. Tant d’agressivité ne lui ressemblait tellement pas ! Mais qu’avait-il bien pu se passé pour qu’une telle fureur s’empare de lui ? Je le connaissais depuis tellement longtemps maintenant ! Lui qui m’avait soutenu à un point que je n’aurai jamais osé imaginer. Lui qui ne m’avait jamais abandonné, même si je l’en ai cru capable au moment de sa mutation, lorsque je ne reconnaissais pas mon Jacob. Même quand j’attendais Renesmée, et malgré sa répugnance envers les vampires il avait fait le guet pour moi jour et nuit pour moi dans une demeure qui le répugnait. Tant d’amour que je n’ai malheureusement pu lui rendre qu’en une amitié certaine. Une amitié si puissante que j’aurai pu donner ma vie pour lui ! Lui qui avait réussi à réchauffer mon cœur du haut de ses 43° ! Je le voyais là, ampli d’une colère inouïe.
C’est à ce moment, qui m’avait paru durer une éternité, que Jacob reprit forme humaine. Un soulagement intense nous ampli, moi et Renesmée. Celle-ci ne les avait pas quitté des yeux, m’interrogeant parfois du regard. Je savais ce que son regard inquiet signifiait, elle n’avait même pas besoin de s’exprimer. Elle ne comprenait pas pourquoi je restais ainsi perché sans venir m’interposé entre ses deux amours. Mais je n’avais jamais vraiment aimé voir ma fille impliquée dans des conflits de ce genre. Même si elle n’était pas aussi fragile que je ne pouvais m’empêcher d’imaginer. Je me demandais souvent ce qu’elle ressentait lorsqu’elle voyait Jacob transformé ainsi. Apparemment ça ne la dérangeait pas tant que ça puisqu’elle adorait grimper sur son dos musclé et se promener des heures durant avec lui. Cependant, cette fois-ci, ce n’était pas du tout le même contexte. C’était la colère qui avait amené Jacob à se transformer. Et je n’aurai jamais laissé approcher ma petite fille d’une telle situation.
Maintenant que Jacob avait reprit forme humaine, je pris ma fille dans mes bras, la transféra sur mon dos pour aller plus vite et je couru aussi vite que mes jambes me le permettaient afin de rejoindre Edward et Jacob. J’arrivais enfin dans la clairière quelques secondes plus tard. A mon grand soulagement Ils avaient l’air tous deux un peu plus serein. Je déposai Renesmée délicatement sur le sol complètement inondé par les pluies qui n’avaient pas cessées depuis plusieurs jours. Pourtant lorsque ma fille posa ses pieds à terre, aucun son ne sortit. Elle me surprenait souvent par sa grâce naturelle. Elle me faisait souvent penser à Alice, surtout sur ce point là ! Edward et Jake ne se quittaient pas des yeux. Je pris la parole afin de rompre ce silence de mort qui hantait la clairière. Je commençai par leur demander ce qui s’était passé. Evidemment, aucun des deux ne broncha. Les deux se toisaient sans dire un mot. Je soupçonnai d’ailleurs Edward de lire dans les pensées de Jake. Celui-ci le regardait avec un air mauvais mais paradoxalement enjoué tel un prédateur devant sa proie. Renesmée prit alors la parole et demanda à son père pourquoi il était en colère. Devant sa curiosité, et surtout face à son si joli minois, il ne résista pas plus longtemps et entama son discours :
« Ma chérie, ne t’inquiète donc pas. Jake et moi étions juste en désaccord sur un certain point. Il persiste à penser que tu serais plus en sécurité si tu allais vivre dans sa maison. Il est évident qu’il se trompe ! Qui mieux que moi, ton père, peut s’assurer de ta sécurité ?
-Je suis désolé Edward mais tu te trompes ! J’aime Renesmée et tu le sais. Lorsque Bella était encore humaine, ne me dis pas que tu préférais la savoir à tes côtés plutôt que chez elle avec son père ! » l’interrompit Jacob.
A cet instant Edward se remit à pousser un grondement tellement fort qu’il nous fit sursauter Renesmée et moi. Jacob muta de nouveau en loup-garou et je tentai de pousser Renesmée de leur champ de bataille. Mais elle me repoussa d’un geste vif et s’interposa entre les deux créatures. Aussitôt, Jacob reprit forme humaine et je poussai un soupir de soulagement. Renesmée, à notre grand étonnement, ne paraissait ni triste, ni apeurée, ni même en colère. Elle arborait un sourire éblouissant sur son visage si parfait. Aussitôt s’imposa à moi une peinture d’une cathédrale d’Italie représentant un archange ! Elle regardait tantôt son père, tantôt son fidèle ami, puis annonça d’une voix joueuse :
« Si vous voulez prouver lequel de vous deux est le meilleur au jeu de la protection, ne vous battez pas ! Jouez ! Je vous propose un bras de fer ! » annonça-t-elle d’un air triomphal.
Il était évident que celui qui gagnerai ce bras de fer assurerai la protection de ma fille ! L’enjeu était sacré et l’épreuve serait passionnante. J’étais fière que ma fille, mon bébé, ait eu cette idée brillante ! Et apparemment cette idée convenait aussi aux deux intéressés, peu désireux de se battre devant leurs amours !
Voyant que Jake et Edward étaient d’accord, Renesmée mit son plan à exécution. Elle plaça, avec mon aide, un rocher au centre de la clairière, et invita les deux adversaires à s’assoir de chaque côté. Ce qu’ils firent d’ailleurs immédiatement et sans mots dire.
J’avais hâte de voir qui gagnerai, et en même temps j’avais une peur qui me tiraillée l’estomac que ce ne soit pas mon cher et tendre amour qui remporte ce duel enfantin. Renesmée lança le coup d’envoi en tapotant dans ses grandes mains. Elle avait les mains d’Edward, des mains de pianiste. Edward et Jacob se positionnèrent, prirent la main l’un de l’autre et fixèrent ma fille comme s’il s’agissait de leur dernière heure. Leur regard ne me rassura pas, il prouvait simplement à quel point ils prenaient à cœur l’enjeu. Et qui aurait pu les blâmer !
La scène était extraordinaire à observer. Que ressentait-il durant ce duel ? L’un à la peau comme la mienne, froide telle une nuit d’hiver et l’autre, à la peau si chaude, brûlante même qui m’avait tant réconforté dans le passé. Leur contact mutuel était-il si désagréable au point qu’ils se regardent ainsi en cet instant ? En effet, tout à coup, et au même moment, les deux adversaires avaient détourné leur regard de leur enjeu. Ils se fixaient, pas avec un regard de haine, non ! Ils avaient tous deux les yeux exorbités, comme s’ils avaient eu une vision. Ma fille et moi ne comprenions pas ce qu’il se passait. Alors nous les fixions, à l’affut d’un mouvement ou d’un mot. Mais rien ne vint immédiatement.
Puis soudain, nous vîmes un sourire se dessiner sur chacun de leur visage. Leur sourire était éblouissant et laissaient apparaître, autant à Edward qu’à Jacob, des dents d’une blancheur extrême. Renesmée et moi nous regardâmes sans mots dire. Une sorte de magie incompréhensible émanait de ces êtres, toujours main dans la main. Ils se lâchèrent puis se levèrent à l’unisson. Ils nous faisaient face à présent. Leur sourire ne s’était toujours pas éteint, et j’étais en proie à une sorte de panique intérieure à laquelle je ne pouvais donner aucune explication. Edward prit la parole le premier :
« Nous avons compris ! Nous étions sur la mauvaise direction depuis le début ! Comment avons-nous pu mettre autant de temps à comprendre ?!
-Je me le demande aussi. Mais le principal est que nous ayons enfin ouvert les yeux ! Qui l’aurai cru ?! » renchérit Jake.
A présent j’essayais de comprendre leurs paroles qui n’avaient aucun sens pour moi. Qu’avait-il bien pu se passer durant ce bras de fer ? Pourquoi réagissaient-ils ainsi à présent ? Je regardai ma fille, elle souriait, du même sourire éblouissant de son père. Etais-je la seule à tenter de trouver une explication logique à leur attitude ? Apparemment oui car Renesmée me prit la main, et sans quitter du regard ses deux protecteurs, expliqua :
« Ils ont compris Maman ! Le choc qu’a produit ce bras de fer entre Papa et Jake à eu un effet plus puissant que je ne l’aurai cru ! Chacun d’eux a ressenti la puissance de l’autre. Ils sont si différents l’un de l’autre ! Mais ils ont enfin compris qu’ils se complètent l’un l’autre ! Ce n’était pas la haine qui les animait, mais le simple désir de me protéger. Et ils n’arriveront à être assez fort que s’ils s’allient au lieu de se battre ! »
Satisfaite de son discours, Renesmée me regarda enfin et me sourit. Elle avait raison ! Pourquoi n’y avais-je pas pensé plus tôt ? Et pourtant tout cela était si évident maintenant ! Ils s’étaient d’ailleurs déjà servis de leur force et de leur pouvoir respectif pour me tenir en vie dans la tente lorsque Victoria me pourchassait. Je fus prise de frissons en repensant à cette époque si lointaine à présent.
Aujourd’hui tout allait bien. Ma fille, si intelligente, avait réussi à ramener la paix au sein de notre étrange famille. Que ferais-je sans elle ? A cet instant précis ma vie me sembla toute tracée. Edward, notre fille et moi à jamais unis. Et Jacob, si important pour sa petite Nessie, et pour moi également, resterai là, toujours, à nos côtés. Et un jour ce serait lui qui aurait notre fille. Elle serait à lui seul, et vice-versa, pour l’éternité.